Ma fille est-elle la réincarnation de Philippe
Léotard ?
Je
ne savais rien de Philippe
Léotard avant de rencontrer
le cinéma de Fernando
Solanas, particulièrement
Tangos, l'exil de Gardel et
Le Sud. Dans
ces deux films, Philippe
Léotard parle
espagnol avec un charmant accent français et j'ai immédiatement
su que
nous pourrions être amis.
Dans ma chambre d'adolescente
j'écoutais
en boucle ses
albums, Je rêve
que je dors surtout,
en imaginant
notre rencontre,
je lui disais Écoutez
Philippe, je sais que vous pourriez être mon père et
j'ai entendu parler de votre problème avec l'alcool,
mais j'aimerais être votre amie. Écoutez
Philippe, il y a dans vos chansons ces mots qui
me manquent. Écoutez Philippe…
Peu
après, j'ai pu rencontrer
Solanas à l'occasion du
festival de cinéma ibérique et latino-américain
et j'aurais voulu
qu'il épouse ma mère,
mais ça c'est une autre histoire.
Et
un soir mes yeux se sont
posés sur la terrasse d'à-côté.
J'étais serveuse le
week-end au
Sunset café et Léotard
dînait
à quelques
mètres de moi. Il y a
une vingtaine
de cafés-restaurants dans la
rue Mercière et il en avait choisi un tout
près et pourtant
si
loin. Je
ne pouvais m'absenter ni
quitter mon poste pour aller
lui parler.
Quelques mètres et le
silence.
Philippe
Léotard est mort neuf ans plus tard, le 25 août 2001. J'étais sur
le point d'accoucher.
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Samantha Barendson