Darry Cowl

Darry Cowl, une dernière facétie


Vous allez sans doute rire de moi mais un des navets les plus attendrissants qu’il m’ait été donné de voir est Le Triporteur avec Darry Cowl, adapté d’un roman de René Fallet. Le film était sorti sur les écrans en 1957. Je vous en fais le pitch en quelques mots : Le doux et distrait, Antoine Peyralout, livreur de boulangerie, est fan de Vaubrelle, l’équipe de football de son village. Il décide de se rendre à Nice avec son triporteur pour assister à la finale de la Coupe de France à laquelle son équipe participe. Ce film léger et bucolique révéla d’ailleurs le comédien Darry Cowl au cinéma.
 
Or, parfois, il arrive sans qu’on le veuille ou non que la chance vous sourie, comme ce jour de vacances où, vers midi et demie, dans le quartier Saint-Charles de B., je fus tout à coup interpellé par les éclats de rire d’une commerçante, dont le magasin de fruits et légumes ouvrait sur la rue. Derrière sa caisse enregistreuse, elle riait d’un rire irrépressible, tandis que des tomates et des poivrons lui pleuvaient sur la tête. De l’autre côté du magasin, sur le trottoir, un Darry Cowl bronzé, mais vieilli, la visait alors gentiment, tel un éternel adolescent, sautillant, avec l’œil qui frisait.
 
Je n’avais pas pris le soin de lui parler. Je le regrette un peu aujourd’hui. Mais cette scène, suffisamment cocasse, m’avait suffi. 

Quelques mois plus tard, le facétieux Darry Cowl tirait sa révérence.
 
---
François-Xavier Farine

Michel Galabru

Au milieu des années 90, je déambule chaque jeudi dans les rues de Lille, fréquentant surtout les enseignes des bouquinistes, des plus exiguës aux plus foutraques, à la recherche d'anciens numéros de la revue Poésie 1, de vieux Maigret ou des livres de Daniel Biga. Je rentre souvent chez moi en fin de journée, fourbu par les kilomètres et le poids de mon sac à dos qui regorge de trouvailles dont je ne suis pas peu fier.

En cette journée automnale qui a été particulièrement douce et délicieuse, je reviens sous les coups de dix-huit heures trente par la rue de Béthune, une des artères principales et commerçantes de la ville, désertée par les passants, car il commence déjà à faire noir...

Face à moi, j’aperçois la silhouette massive d’un individu à la démarche chaloupée, vêtu d'un costume beige et de chaussures richelieu. Il foule le pavé, accompagné de deux charmantes dames qui semblent être sa femme et sa fille, les bras chargés de sacs de magasins de luxe.

Personne ne semble l'avoir reconnu... Personne ne pense peut-être avoir la chance de croiser, ici même, à cette heure tardive, cet acteur-là ?

Qui imaginerait sous les atours de cet homme élégant et distingué, Michel Galabru, lui-même, l'acteur bonhomme et rondouillard, au képi de travers, qui campe l'adjudant Gerber dans la célèbre série des Gendarmes... excepté moi.

En le saluant timidement, je retrouve soudain le sourire éclatant de ma jeunesse, comme lorsque nous avions assisté, ma mère, mon frère et moi, à la projection du Gendarme et les Extra-terrestres au Cinéma Gaumont, à quelques mètres de là seulement, dans la même rue, presque vingt ans plus tôt.

---
François-Xavier Farine

Chantal Lauby


Chantal Lauby nous a laissés piteux devant un baby-foot

Juillet 1989, je découvre Biarritz, la Côte Basque et ses vagues déferlantes, le paradis des surfeurs et les filles en monokini.

Un soir, je rejoins mon pote, Jérôme T., à l'étage du Casino Municipal. Il y a un café-drugstore avec plusieurs pistes de bowling, une salle de snooker et quelques jeux d'arcade. De l'extérieur, on a une vue magnifique sur la Grande Plage illuminée, et la foule qui se promène sur la digue, en contrebas. Nous avons pris l'habitude de nous y retrouver, régulièrement, pour boire un verre et y jouer au baby-foot.
Pendant une de nos parties, un homme et une femme s'approchent. La femme, brune et bronzée, pose une pièce de 2 francs dans le cendrier du baby-foot Bonzini. Pour nous rattaquer*. Jérôme et moi la reconnaissons tout de suite. Mais, dès le début de la partie, il faut rester concentrés et faire bonnes figures face à cette redoutable adversaire qui manie ses attaquants avec dextérité. Et, à chaque but qu'elle claque dans notre cage, on sent qu'elle éprouve une réelle fierté à nous donner une belle petite leçon ! Le score est sans appel : 13 à 1. À la fin de la partie, elle se retire avec son partenaire, en nous remerciant, un sourire aux lèvres.

* Synonyme de « défier ».
---
François-Xavier Farine

Hubert Mounier

Hubert Mounier c'est l'homme avec qui j'ai adopté un petit garçon de neuf ans un soir d'été place des Jacobins.

Hubert s'appelait encore Cleet Boris et moi j'étais serveuse au Sunset café, un bar de la rue Mercière. Avec l'Affaire Louis' Trio, il répétait toutes les semaines dans un studio non loin de là. De la fenêtre du café, je voyais passer, démarche chaloupée, coiffures et costumes d'un autre temps, Cleet Boris, Karl Niagara et Bronco Junior. Trois hommes par la fenêtre d'une comédie musicale où résonnaient les notes de Chic Planète ou Bois ton café. Je les regardais ainsi sans jamais pouvoir leur dire un mot ni leur adresser un sourire.

Et puis cet homme ivre agressa un passant dans la rue une nuit alors que je sortais du travail. Il y avait des cris, des insultes, des menaces et les sanglots d'un enfant qui disait Arrête papa, arrête… Je pris immédiatement l'enfant dans mes bras pour l'éloigner de cet homme qui agitait les siens avec violence et maladresse. Ce dernier cessa alors son agression verbale, nous regarda, le passant, l'enfant et moi, et partit en courant vers la vieille ville pour trouver d'autres bars, d'autres alcools, certainement. Abandon nocturne d'un fils qui continuait de pleurer dans mes bras, son nez calé dans mon cou. Vous allez bien ? me demanda la voix de Cleet Boris dont je n'avais pas reconnu les traits jusque là. Il était plus de minuit, nous étions Hubert Mounier et moi place des Jacobins avec un petit bonhomme dont nous ne savions rien. Le gamin finit par se calmer et après ses pleurs, il eut ses mots, son prénom, celui d'une nounou et une adresse. Trois ombres comme une famille le temps de traverser le pont, sonner à une porte, une main sur la joue, un dernier sourire et nous dire au revoir. Il s'appelait Victor. Il doit aujourd'hui avoir trente-trois ans, j'espère qu'il a su esquiver la violence de son père, j'espère qu'il est heureux. Hubert m'a payé un taxi et je suis rentrée chez moi.

Hubert Mounier c'est l'homme de cette nuit de 1992 où nous trouvâmes un enfant.

---
Samantha Barendson

Jil Caplan

Jil Caplan à la fête de la moule

Un soir de juillet 1997, tandis que je travaillais comme coursier dans un journal, j’ai filé à la fête de la Moule de Wimereux avec une jeune et sémillante journaliste-stagiaire. Je ne sais plus précisément les raisons qui nous avaient poussés à faire cette escapade de près de 300 km en voiture jusque là-bas.
Je crois que nous avions appris dans la presse que Jil Caplan serait la tête d'affiche de la fête de la Moule de cette station balnéaire : ayant d'abord cru à un canular, nous avions voulu authentifier l'information.

Au milieu de la fête de la Moule qui battait son plein, Jil Caplan était bien présente, sous un chapiteau de toile, parmi les odeurs de moules-frites dont les gens se bâfraient à toutes les tables. Mon amie journaliste ne put s’empêcher tandis que nous buvions un verre, en compagnie d’un couple d’amis, de se rendre jusqu'à "la loge" de Jil Caplan pour tâcher d’obtenir une interview. Elle revint, ravie, quelques minutes plus tard. Jil Caplan avait accepté de lui répondre. Décrocherait-elle un scoop ? Des révélations sur la vie privée de la chanteuse ? Sur sa prochaine collaboration artistique ? Son nouveau projet discographique ? L’interview devait se dérouler après sa prestation.

Malgré la reprise de son ancien tube Tout ce qui nous sépare, Jil Caplan chanta dans l’indifférence quasi générale. Elle semblait visiblement agacée de se trouver ici. J’étais triste pour elle. Je trouvais qu'elle ne méritait pas cette dégringolade, ce désamour soudain. Devait-elle désormais courir le cachet, en jouant à la chanteuse de seconde zone ? Elle, que je revoyais rayonnante et pêchue, quelques années plus tôt, dans une des émissions musicales de Naguy ou lorsqu’elle avait remporté, en 1992, une Victoire de la musique dans la catégorie révélation féminine de l’année…

Jil Caplan interpréta néanmoins une quatrième chanson, face à un public clairsemé dont nous faisions partie, avec le même professionnalisme, micro au poing.
Je m'étais laissé emporter par les paroles de sa voix sensuelle et veloutée, avec ce ciel d'été lumineux et sans nuages qui brillait au-dessus de nos têtes, lorsque tout à coup sa voix, si envoûtante, s'est mise à dérailler. Interrogation, puis stupéfaction dans l'assistance... lorsque tout le monde a compris que la chanteuse avait effectué jusque là un play-back presque parfait !

Entre temps, Jil Caplan s'était retournée vers le gars de la sono, en le fusillant du regard. Car, pendant un laps de temps démesurément long, le jeune gars, planqué derrière sa console, n'avait pas du tout réagi, laissant le CD rayé répéter, en boucle, les mêmes paroles désenchantées. Il eut beau remettre en catastrophe le morceau dans la platine et Jil Caplan reprendre sa chanson au début : le mal était fait ! Le CD défectueux sauta puis re-sauta à nouveau... 

Vexée, l’artiste avait alors quitté précipitamment la scène avant de rejoindre son taxi avec chauffeur qui l'attendait derrière des barrières de sécurité, sans saluer personne, ni adresser un mot non plus à mon amie journaliste qui aperçut, comme nous, la voiture fuir en trombe de la traditionnelle fête de la Moule, sous le soleil couchant.

Le lendemain, j'avais imaginé que mon amie journaliste relaterait l'incident dans la presse régionale en titrant, par exemple : À la fête de la Moule de Wimereux, la chanteuse, Jil Caplan, pas vraiment dans son assiette.
Mais, sans doute, dans une tristesse partagée, s'était-elle refusée à tirer sur l'ambulance.

---
François-Xavier Farine

Johnny Hallyday


Entre seize et vingt ans j'étais serveuse, mes amis partaient tous les étés à Ibiza et moi je restais à servir les touristes, un peu déprimée de ne pas aller danser. Un soir, une amie d'une amie me dit que ses copines et elle préfèrent les vacances en septembre. Les téléphones portables n'existaient pas encore mais elle me dit passe nous voir sur place des Lices à Saint-Tropez nous y sommes tous les soirs à l'heure de l'apéro.

L'été passe, je reçois des cartes postales de l'Amnesia, du Pacha ou du Privilege tandis que je travaille douze heures par jour à servir des salades lyonnaises et des verres de Côte du Rhône à des groupes de japonais ou d'italiens. Arrive septembre et je monte dans un train au trajet interminable, mais je suis heureuse d'être enfin en vacances et j'attends avec impatience de voir la mer par la fenêtre du wagon qui fait tatactatoum, Lyon, Valence, Montélimar, tatactatoum, Avignon, Marseille, Saint-Cyr-sur-Mer, tatactatoum, Bandol, Toulon, Hyères, Le Lavandou, tatactatoum, Cavalaire-sur-Mer, Gassin et Saint-Tropez.

La première chose que je vois en arrivant c'est un panneau publicitaire pour la fondation de Brigitte Bardot au secours des animaux partout dans le monde. Pas de doute, je suis à Saint Trop'. Je m'arrête dans un bar, demande un café que je paie quinze francs, scandalisée. Pour le prix, je demande mon chemin, celui de la place des Lices où Eddie Barclay joue aux boules.

Je n'ai jamais trouvé la fille et ses copines, j'ai rencontré une barmaid qui m'a invitée à une rave où j'ai dansé ne sachant où dormir. Le lendemain, assise sur le muret dos à la mer, je regarde plusieurs mannequins, en culotte et t-shirt, descendre des yachts amarrés, aller chercher des croissants. Assise et ahurie, je vois passer Johnny Hallyday. Derrière lui, une foule de femmes hystériques se rapproche rapidement. Et parmi elles, une femme qui pousse un immense landau.

Johnny a-t-il jamais vu Le cuirassé Potemkine ?

---
Samantha Barendson

Prince

Orange and Purple

Il avait à peine 18 ans…
Il avait eu son bac à 14 ans en étudiant à Henri IV, et survolait sa prépa à Louis Le Grand. Enervant.
J’avais deux ans de plus que lui. Et trente centimètres de moins.
Un grand prince aux cheveux roux. Un poil de carotte bien élevé, déjanté, et si grand…
Il parlait comme un romantique, je sentais le croissant chaud. Il avait lu de beaux textes, et tentait d’abriter, dans un loden bleu-marine, sa peau pâle.
Mon grand Prince était un sorcier.
1984. Ce fut incandescent.
La nuit nous dansions chez Castel. Le jour, nous dormions, et en fin d’après-midi, allions au cinéma.
27 juillet. Carrefour de l’Odéon. Purple Rain. Un autre prince, le kid. Un "petit" gars du Minnesota.
Cent onze minutes d’hallucination. Des mains serrées, des riffs qu’on ne voulait pas voir finir, des baisers dans le noir, un érotisme assumé. 

I never meant to cause you any sorrow
I never meant to cause you any pain
I only wanted to one time see you laughing
I only wanted to see you laughing in the purple rain

La séance se termine.
Impossible de quitter cet univers. 
Huit minutes de désir.
Nous sortons envoutés.
Sans même échanger un mot, Laurent et moi revenons vers la caisse et achetons un nouveau billet.
Ce jour là, nous étions en communion avec le Prince, sa guitare envoutante. L’orange et le pourpre se sont tenus la main.
Et oui.
Il neige en avril.

---
Texte et illustration : Edith Simonnet

Anthony Quinn

Je me baladais dans Bruxelles, sans but véritable, cherchant aventure. C'était à l'époque – je devais avoir dix-neuf ou vingt ans – une de mes activités favorites. Je séchais les cours, j'avais la journée devant moi et le monde m'appartenait.

Tournant le dos à la Porte de Namur et à ses cinémas, je descendais la rue homonyme – de Namur – en direction de la Place Royale, avec dieu sait quelle intention inavouable et muséale. Ben oui, les musées étaient gratuits à cette époque bénie, et plein d'étudiantes de l'académie pas farouches du tout – il faut tout vous expliquer ou quoi ?

Il remontait la rue en sens inverse, massif, immense. Un bref regard et hop, le voilà passé. Je m'entends encore penser qu'est-ce qu'il ressemble à Anthony Quinn, ce type... et me dire, dans la foulée non, c'est pas possible, qu'est-ce que Zorba pourrait bien venir foutre à Bruxelles. Il a autre chose à faire le mec. Ce n'est pas lui, ça ne peut pas être lui... je ne vais pas me rendre ridicule à lui demander un autographe, en plus il a une tête à ne pas avoir envie qu'on l'emmerde.

Je le regardai s'éloigner quand même, encore plus impressionnant de dos, en rêvassant aux Canons de Navarone.

Le soir, à la radio, ils mentionnaient la présence à Bruxelles d'Anthony Quinn pour enregistrer un quarante-cinq tours. Faudrait oser, parfois. 


---
Marc Menu

Jeane Manson

Un dîner chez Claire

Les dîners chez Claire ont toujours été des moments surprenants, improbables et précieux. Claire est l’une des épouses de l’un de mes précédents maris. Bref.
Une femme délicieuse qui aime que ses amis, ses amours, se rencontrent.
A Paris, près de la Maison la Radio, dans le 16ème arrondissement, ce soir là, nous arrivons avec avidité, et retard.
Sur l’un de ses canapés, une blonde forcément nord-américaine.
Les cheveux brushés comme dans un épisode de Dallas, un regard bleu,vert, violet. Tout ce qu’elle portait, vêtements et bijoux se reflétait dans ses yeux.
Claire nous présente. Jean Ann, américaine née à Cleveland Ohio, fille d’un écrivain et d’une chanteuse devenue peintre. Ce sourire franc, cette voix, cette simplicité. Je me souviens.
Faisons l’amour, puisque c’est fini nous deux.
Lovée contre l’épaule de Julio Iglesias, partageant les combats de son Bougrain-Dubourg, ayant les larmes aux yeux près de Christian Delagrange... Jeane Manson
Elle était ce soir là au bras d’un ministre. Aussi discret qu’elle était solaire.
Chanteuse, actrice, playmate… tant d’autres aventures et tellement d’authenticité. 
Cette camaraderie toute nord-américaine. Les filles ne se jaugent pas, elles sont de la même race, de la même espèce. On ne joue pas à qui est la plus belle, qui est la plus jeune, qui est la plus riche, qui est ton mari ?
Non. On se pose juste sur le canapé de Claire, et on échange. On rigole. On se moque de nous, de nos échecs. On se félicite de nos succès, enfin… surtout des siens.
Une femme délicate dans un corps de tentatrice.
Et j’entends encore Faisons l’amour, "pouisque" c’est fini nous deux.
Son délicieux accent, son élégance qui lui a fait oublier toutes les trahison. Cette soirée fut trop courte.
Je garderais le meilleur de nous deux. Ça fait trop mal de dire Adieu…

---
Edith Simonnet

Yasmina Reza

Étudiante, j'allais régulièrement voir des pièces du Club théâtre de la fac. Le club était essentiellement composé d'étudiants qui sélectionnaient les pièces à jouer. Parfois un enseignant ou un administratif s'inscrivait mais repartait rapidement déçu de tenir seulement le rôle du « vieux ».

Grâce à ce club, dont j'allais rapidement faire partie, j'ai pu connaître de nombreux auteurs. Les classiques, Shakespeare ou Lope de Vega. Les super classiques, Jean Racine ou Jean Anouilh. Les russes, Ivan Tourgueniev ou Valentin Kataïev. Et surtout les vivants, Eric-Emmanuel Schmitt ou Yasmina Reza.
Mon amour de l’œuvre de Yasmina Reza fut immédiat. Ce mélange d'humour et de classe, de décalage dans le savoir-vivre, de préciosité contemporaine, de moquerie affectueuse. Il y avait dans ses textes une fraîcheur et une exigence qui me poussaient à la lire encore et encore.

Et puis un jour je l'ai rencontrée.

Séance de dédicace dans une grande librairie de Lyon. Moi tremblante, un livre à la main L'Homme du hasard, l'histoire d'une dérencontre dans un train entre une femme qui lit un livre et l'auteur dudit livre assis face à elle. Je fais la queue pour une signature. Pour deux signatures, car Philippe Noiret est également présent.

Je fais la queue et j'écoute les mots qui se disent avant notre rencontre, une rencontre qui sera brève, je le sais. La femme qui se trouve avant moi est émue elle aussi et, lorsque son tour arrive, elle lui dit qu'elle l'aime, qu'elle adore ses textes et qu'en ce moment-même, avec sa troupe d'amateurs, elle joue l'une de ses pièces. C'est alors que Yasmina Reza se transforme en furie et s'insurge que l'on puisse jouer sa pièce sans permission, sans reverser de droits d'auteurs, sans… Et la femme de lui expliquer que la pièce est jouée gratuitement et échappe donc à la demande d'autorisation. Yasmina se ressaisit, sourit, passe à autre chose et mon tour arrive. Je tends mon livre, épelle mon prénom et passe à autre chose.

Philippe Noiret est un homme délicieux, nous avons passé quelques minutes à refaire le monde durant lesquelles il m'a appelée "mon petit".

---
Samantha Barendson