Prince

Orange and Purple

Il avait à peine 18 ans…
Il avait eu son bac à 14 ans en étudiant à Henri IV, et survolait sa prépa à Louis Le Grand. Enervant.
J’avais deux ans de plus que lui. Et trente centimètres de moins.
Un grand prince aux cheveux roux. Un poil de carotte bien élevé, déjanté, et si grand…
Il parlait comme un romantique, je sentais le croissant chaud. Il avait lu de beaux textes, et tentait d’abriter, dans un loden bleu-marine, sa peau pâle.
Mon grand Prince était un sorcier.
1984. Ce fut incandescent.
La nuit nous dansions chez Castel. Le jour, nous dormions, et en fin d’après-midi, allions au cinéma.
27 juillet. Carrefour de l’Odéon. Purple Rain. Un autre prince, le kid. Un "petit" gars du Minnesota.
Cent onze minutes d’hallucination. Des mains serrées, des riffs qu’on ne voulait pas voir finir, des baisers dans le noir, un érotisme assumé. 

I never meant to cause you any sorrow
I never meant to cause you any pain
I only wanted to one time see you laughing
I only wanted to see you laughing in the purple rain

La séance se termine.
Impossible de quitter cet univers. 
Huit minutes de désir.
Nous sortons envoutés.
Sans même échanger un mot, Laurent et moi revenons vers la caisse et achetons un nouveau billet.
Ce jour là, nous étions en communion avec le Prince, sa guitare envoutante. L’orange et le pourpre se sont tenus la main.
Et oui.
Il neige en avril.

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Texte et illustration : Edith Simonnet